Comment allier les universités et les villes pour le climat
- Face à l’aggravement de la crise climatique, les villes et les universités travaillent en coopération.
- Il s’agit d’organiser une activité de réflexion, de formation et de recherche pour que les villes s’impliquent dans la lutte contre le réchauffement climatique.
- Cette alliance facilite le contact entre des partenaires académiques et institutionnels et crée un réseau mondial de chercheurs et décideurs publics.
- L’École polytechnique (IP Paris) collabore par exemple avec la Ville de Paris pour l'évaluation de son plan climat et dans le cadre de la stratégie finance verte et durable portée par la Région.
- Au sud, c’est la ville de Marseille qui s’engage avec Aix-Marseille Université pour revoir ses politiques de mobilité, d’énergie et de préservation de la biodiversité.
Edward Glaeser, économiste à l’Université de Harvard, considérait en 2011 que les villes étaient les endroits les plus sains, les plus écologiques et les plus riches. On vit plus longtemps à New York, en meilleure santé et en consommant 40 % moins d’énergie qu’en banlieue1. Mais les villes et métropoles du XXIe siècle sont amenées à subir des changements profonds à l’avenir, à la fois technologiques, environnementaux et sociaux.
Le changement climatique et les risques induits pour la santé posent notamment un problème majeur à nos villes et métropoles : la pollution de l’air est en effet responsable à elle seule de 3 millions à près de 9 millions de morts par an, soit près de 1 mort sur 5 à l’échelle de la planète – et jusqu’à 3 fois plus que la Covid-19 (estimée à 3 millions de morts).
Une union contre le changement climatique
Alors que la crise climatique mondiale s’aggrave, les villes et les universités font preuve d’un engagement sans précédent.
Tout d’abord, étant donné leur double nature d’institution politique les plus proches des citoyens et de principales fournisseuses de services publics, les villes s’engagent à aborder le changement à travers les impératifs de durabilité, de participation et d’égalité. Ces mêmes principes guident les actions d’un nombre croissant d’universités, qui sont également désireuses de contribuer en termes de recherche et de formation, à la fois sur les caractéristiques du changement climatique et sur les meilleurs outils pour le contrer et l’intégrer aux mesures gouvernementales.
Cette convergence d’intentions favorise une synergie croissante entre les villes et les universités. Lors de la COP27 à Charm el-Cheikh, le City Diplomacy Lab de Columbia Global Centers Paris et l’AIMF (Association internationale des maires francophones) ont organisé une table ronde au Pavillon international de la Francophonie le 8 novembre2, réunissant – aux côtés de Lorenzo Kihlgren Grandi et Patricia Crifo – Michèle Rubirola, Première adjointe au maire de Marseille ; Slim Khalbous, recteur de l’Agence universitaire de la francophonie ; Etotépé Sogbohossou, directrice du département environnement de l’Université Senghor à Alexandrie ; Mélody Braun, membre associé de l’Institut international de recherche sur le climat et la société (IRI) à l’École du climat de l’Université Columbia.
Le City Diplomacy Lab de Columbia Global Centers Paris est une alliance sans précédent entre des universitaires et des praticiens de l’action internationale des villes. Il déploie une méthodologie pluridisciplinaire pour élargir la compréhension et la pratique de la diplomatie des villes et contribuer à son évolution. Il développe à la fois de la recherche (cadre théorique, données et analyses comparatives) et de la formation aux questions de diplomatie des villes (pour les étudiants universitaires et les responsables municipaux, nationaux et internationaux), mais aussi de la pratique en conseillant les acteurs locaux et internationaux.
De plus, l’Association internationale des maires francophones (AIMF) regroupe depuis 1979 les maires de villes qui ont la langue française en partage et qui portent collectivement un projet de société : construire des villes durables dans leurs aspects sociaux, économiques et environnementaux grâce à une gouvernance inclusive et ouverte.
Quels sont les objectifs de la collaboration Ville-Université ?
Un événement organisé à la COP27 a porté sur le rôle des alliances entre les villes et les universités pour le développement durable et le climat. À cette occasion, plusieurs cas emblématiques d’alliances Villes-Universités pour le climat et le Développement Durable ont été présentés. Par exemple, l’École polytechnique et la Ville de Paris ont développé depuis 2019 un partenariat novateur et original dans le but de répondre à une problématique commune, à savoir comment les villes et les universités peuvent lutter efficacement ensemble contre le changement climatique.
Concrètement, il s’agit d’une part d’organiser une activité de réflexion, de formation et de recherche pour favoriser la contribution des villes à la lutte contre le changement climatique, avec le Plan climat par exemple. D’autre part, il s’agit de faciliter le contact direct des partenaires académiques et institutionnels en s’appuyant sur la création d’un réseau mondial de chercheurs et décideurs publics.
La convergence d’intentions en faveur du climat favorise une synergie croissante entre les villes et les universités.
Cette collaboration permet d’évaluer les perspectives offertes par le numérique, les nouveaux enjeux d’infrastructure et de la smart city ainsi que l’anticipation des grands risques auxquels devront faire face les métropoles. Ce sont les étudiants du MScT Economics for Smart Cities and Climate Policy3 qui s’intéressent, dans leur mémoire de fin d’étude (dans le cadre de leur capstone projects), à toutes les dimensions d’un plan climat et finance durable. Ce sont également eux qui doivent imaginer des pistes pour l’avenir. Les étudiants bénéficient à ce titre des conseils d’un professionnel de l’institution partenaire impliquée, qui peut aider dans l’accès à des données pertinentes. Les étudiants sont encadrés par un professeur référent du Master qui a la charge de la partie académique.
Concrètement, les sujets traités sont multiples : ils vont des politiques de circulation et mobilité à Paris (plan vélo, subvention des VAE, deux-roues motorisés, ravitaillement électrique, gestion des véhicules anciens, tarification carbone) aux rénovations énergétiques, constructions bio-sourcées et aux bâtiments intelligents en passant par la réduction du plastique, le gaspillage alimentaire, la tarification et la valorisation des déchets ou encore la biodiversité, l’agriculture urbaine, les fake news et les villes, le sport et la santé.
De même, l’École Polytechnique et la région Île-de-France sont engagées dans une coopération depuis janvier 2021. Or, depuis la loi sur la Nouvelle Organisation Territoriale de la République (7 août 2015) et la loi sur la Transition Énergétique pour la Croissance Verte (17 août 2015), les régions françaises deviennent des acteur-clés de la mise en œuvre des politiques de l’énergie, de la qualité de l’air et du climat. Compte tenu de leur responsabilité et de leurs compétences (urbanisme, mobilité, etc.), les collectivités sont des acteurs incontournables pour agir en faveur de la qualité de l’air, mais aussi de l’énergie et des différentes politiques de développement durable.
L’objectif de la collaboration entre la région et l’École Polytechnique consiste à réaliser des travaux en commun – et en particulier des études d’impacts économiques et sociaux – concernant le territoire francilien, dans le cadre de la stratégie finance verte et durable portée par la Région.
Marseille et le développement urbain durable
Des questions multiples se posent dans le cadre de telles collaborations entre villes ou régions et établissements universitaires, que ce soit par exemple sur les mesures à prendre pour atteindre des objectifs ambitieux ou la mesure d’impact d’un plan climat et d’une stratégie finance durable.
Il s’agit d’organiser réflexion, formation et recherche pour favoriser la contribution des villes à la lutte contre le changement climatique.
Parmi les exemples de collaboration entre Ville et Université pour le climat et le Développement Durable qui existent, citons Marseille. En effet, la Ville de Marseille a été choisie en avril 2022 par la Commission Européenne (parmi les 377 communes qui avaient candidaté) pour participer au programme européen des « Cent villes neutres en carbone d’ici 2030 ». Pour atteindre cet objectif, Marseille a fait le choix de s’engager dans les transports et la mobilité, la réhabilitation thermique du parc immobilier et des équipements publics, la production d’énergie durable, le retour de la nature en ville, la préservation du littoral et de la biodiversité, l’inclusion et l’innovation. Et pour relever ce défi, c’est notamment avec Aix-Marseille Université que la Ville de Marseille a co-construit le projet.
C’est donc un grand espoir pour trouver des solutions de développement urbain durable et des outils efficaces d’atténuation et d’adaptation au changement climatique.