Infographie : Quels pays émettent le plus de gaz à effet de serre ?
- En 2022, 53,8 milliards de tonnes de gaz à effet de serre (GES) ont été rejetées dans l’atmosphère par les activités humaines.
- La Chine, les États-Unis, l’Inde, l’UE et la Russie sont dans l’ordre décroissant les plus grands émetteurs de GES.
- Les activités à l’origine de ces émissions sont la production d’électricité et de chaleur, suivie par l’industrie manufacturière, le transport, l’agriculture, l’exploitation du pétrole, les bâtiments et les déchets.
- La baisse des émissions de GES de l’Europe depuis 1990 souligne notamment la désindustrialisation européenne au profit de l’importation de biens étrangers.
- La mesure des émissions de GES évoquée jusqu’à présent ne prend cependant pas en compte le secteur des terres ou les importations et exportations des États (contrairement à l’empreinte carbone).
En 2022, 53,8 milliards de tonnes de gaz à effet de serre (GES) ont été rejetées dans l’atmosphère par les activités humaines1. Ces gaz y persistent – de quelques années à plusieurs siècles selon leur nature – et leur concentration augmente. Plus précisément, en 2019, la concentration de CO2 est plus élevée de 47 %, celle de CH4 de 156 % et celle de N2O de 23 % par rapport aux niveaux de 1750 (représentatifs de l’ère préindustrielle)2. Il s’agit des principaux GES émis par les activités humaines. Résultat : la température moyenne globale s’accroit, de façon quasi proportionnelle à la concentration en CO2, le principal GES d’origine anthropique (émis par les activités humaines). Le réchauffement global s’élève à +1,1 °C pour la période 2011–2020 par rapport à l’ère préindustrielle (1850–1900).
Tous les États rejettent des gaz à effet de serre. Selon la base de données européenne EDGAR, la Chine (15,7 milliards de tonnes de CO2e), les États-Unis (6 milliards de tonnes de CO2e), l’Inde (3,9 milliards de tonnes de CO2e), l’Union européenne (3,6 milliards de tonnes de CO2e) et la Russie (2,6 milliards de tonnes de CO2e) sont les plus émetteurs en 2022. La France se hisse à la 20ème position du classement par pays (0,4 milliard de tonnes de CO2e selon la même base de données). À la toute fin du classement, on trouve logiquement des États peu peuplés : les Îles Féroé, Saint-Pierre-et-Miquelon, Anguilla, les Îles Falkland et Sainte-Hélène, Ascension et Tristan da Cunha rejettent quelques dizaines de milliers de tonnes de GES chaque année.
Atténuer le changement climatique : chaque geste compte
Attention : ce classement ne doit pas servir d’excuse aux « petits émetteurs ». Certains argumentent en effet qu’il est inutile que les pays ne représentant qu’une faible part des émissions mondiales agissent. Cela est faux, pour plusieurs raisons. L’ensemble des pays émettant moins de 2 % des GES – 202 sur 210, la quasi-totalité ! – comptabilise 38,4 % des émissions totales. Si aucun de ces pays ne réduit ses émissions, il sera impossible de respecter les Accords de Paris et de maintenir le réchauffement sous 1,5 °C voir 2 °C. Et chaque contribution compte, puisque la température globale augmente à mesure de la hausse de la concentration des GES dans l’atmosphère. « Aucun pays ni aucun secteur d’activité ne peut se prétendre épargné par la nécessité de réduire les émissions de GES », conclut Étienne Mathias.
Les activités à l’origine de ces émissions ? Arrive cette fois en tête du classement la production d’électricité et de chaleur, suivie par l’industrie manufacturière, le transport, l’agriculture, l’exploitation du pétrole, les bâtiments et les déchets. Lorsqu’on regarde les rejets de chaque gaz, les résultats sont très contrastés. La combustion des énergies fossiles est responsable de 81 % à 91 % des rejets anthropiques de CO2, l’élevage et les combustibles fossiles de la majorité des rejets de CH4 et la fertilisation de ceux de N2O.
Au cours des dernières décennies, la répartition des émissions mondiales des GES a beaucoup évolué. La croissance des rejets de la Chine est la plus importante, elle suit une courbe presque exponentielle : les émissions du pays surpassent celles de tous les autres depuis 2004. Quant aux émissions de l’Union européenne, elles baissent sensiblement depuis les années 90. Ces données étant uniquement territoriales, cette évolution souligne notamment la désindustrialisation de l’Europe au profit de l’importation de biens étrangers. D’autres pays comme l’Inde, le Brésil ou le Vietnam voient leurs rejets augmenter progressivement et de façon continue depuis les années 70.
Alors qu’il est impossible de mesurer directement les émissions de GES de chaque pays, plusieurs estimations existent. « Elles illustrent chacune des aspects différents des impacts des activités humaines et présentent chacune leurs limites », pointe Étienne Mathias. Les données évoquées jusqu’à présent dans l’article concernent les émissions de l’ensemble des GES (ce que reflète l’unité CO2 équivalent) liées aux activités humaines – industrie, transport, agriculture etc. – hors secteur des terres. Elles ne prennent donc pas en compte les rejets liés à la conversion des terres, à la déforestation, aux feux de forêts, etc… « Lorsqu’on s’intéresse aux actions d’atténuation, il est pertinent de regarder les émissions sans intégrer le secteur des terres – dont le périmètre peut varier d’un indicateur à l’autre, précise Étienne Mathias. Ce sont ces émissions qui sont principalement visées par les politiques publiques. »
Autre précision importante : ces données n’incluent que les émissions territoriales des États. Les rejets de GES relatifs aux biens fabriqués à l’étranger et importés ne sont donc pas intégrés dans les indicateurs précédents. Seul l’indicateur « empreinte carbone » intègre les importations et exportations des États. Son calcul repose sur la somme des émissions des ménages, de la production intérieure et des importations auxquelles sont soustraites les émissions associées aux exportations. D’après le dernier rapport du Haut conseil pour le climat3, l’empreinte carbone de la France en 2022 est 1,6 fois plus élevée que ses émissions territoriales.
Les derniers chiffres de la France
Entre 2022 et 2023, les émissions de GES de la France ont diminué de 5,8 % pour atteindre 373 millions de tonnes de CO2e4. Cette estimation est celle de l’inventaire national officiel demandé par les engagements internationaux, calculé par l’association Citepa. Le rapport souligne que tous les grands secteurs émetteurs ont participé à cette réduction. Mais derrière cette bonne nouvelle se cache un résultat préoccupant pour l’avenir.
La stratégie nationale bas-carbone (SNBC) fixe les objectifs de la France pour atteindre la neutralité carbone en 2050. En 2023, l’objectif est bien respecté si le secteur des terres n’est pas intégré. Mais lorsque les puits de carbone – c’est-à-dire le CO2 stocké dans les végétaux et les sols – sont intégrés, la France échoue cette fois à atteindre l’objectif qu’elle s’était fixé pour la période 2019–2023. En cause ? La réduction considérable du puits de carbone, passé de 45 millions de tonnes de CO2 dans les années 2000 à 20 millions de tonnes de CO2 aujourd’hui « en raison de l’effet couplé de sécheresses à répétition depuis 2015, de maladies affectant le taux de mortalité des arbres et d’une hausse des récoltes de bois » d’après le Haut conseil pour le climat.
« Les objectifs de la SNBC‑2 reposent sur un puits de carbone plus important qu’aujourd’hui pour réussir à atteindre la neutralité carbone, souligne Étienne Mathias. Si le puits est plus faible que prévu, cela signifie qu’il faudra limiter encore plus que prévu les rejets de GES. C’est très compliqué : les émissions restantes en 2050 sont celles de l’agriculture, elles sont jugées peu compressibles. »