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π Santé et biotech
Comment surmonter la résistance aux antibiotiques

La crise de l’antibiorésistance en chiffres

Agnès Vernet, journaliste scientifique
Le 16 juin 2022 |
2 min. de lecture
Agnès Vernet
Agnès Vernet
journaliste scientifique
En bref
  • Pour éviter la catastrophe sanitaire, non seulement nous devons trouver de nouvelles solutions antimicrobiennes, mais également réduire l’utilisation inutile de traitements.
  • L’ECDC a notamment publié une infographie récente montrant l’évolution de la résistance aux antibiotiques de différentes bactéries.
  • Cette résistance est également un problème vétérinaire car elle est aggravée par l’usage des antibiotiques en élevage.
  • 252 agents antibiotiques ciblant les pathogènes prioritaires sont en phase préclinique. La petite part de ces molécules qui s’avérera sûre et efficace pour l’Homme ne sera pas disponible avant une décennie.

Le con­stat est clair, pour éviter la cat­a­stro­phe san­i­taire, non seule­ment nous devons trou­ver de nou­velles solu­tions antimi­cro­bi­ennes, mais égale­ment réduire l’utilisation inutile des traite­ments. Deux axes com­plé­men­taires et indis­pens­ables selon les experts. Et pour­tant, quand on regarde les chiffres, les efforts ne sont pas encore sensibles.

Toujours un cap en hausse

+2,1 % : Voici l’évolution de la con­som­ma­tion glob­ale d’antibiotiques à l’hôpital entre 2019 et 2020 selon San­té publique France. Dans le même temps, la con­som­ma­tion en ville a dimin­ué, en grande part à cause de la baisse de soins due aux confinements.

Nbr DDJ/1000 JH = Nom­bre de dos­es définies jour­nal­ières pour 1 000 journées d’hospitalisations.
Nom­bre de DDJ/1000H/J = Nom­bre de dos­es définies jour­nal­ières pour 1 000 habi­tants par jour.
Sources : San­té publique France, rap­port en secteur hos­pi­tal­ier et en secteur de ville

Les don­nées du cen­tre européen de sur­veil­lance des mal­adies (ECDC) mon­trent que même en Europe la résis­tance aux traite­ments est présente. Pour les Kleb­siel­la pneu­mo­ni­ae, la plu­part des souch­es cir­cu­lantes sur notre con­ti­nent sont résis­tantes aux car­bapenèmes, une classe d’antibiotiques très util­isée. Une ten­dance tou­jours à la hausse mal­gré les efforts des cen­tres experts. En revanche, les Staphy­lo­co­ques dorés résis­tants à la méti­cilline sont de moins en fréquents. Les pro­grès sont donc possibles.

© ECDC

Et cette ten­dance ne se résume pas aux antibi­o­tiques courants. Cette info­gra­phie inter­ac­tive de l’ECDC mon­tre la crois­sance des résis­tances con­tre les antibi­o­tiques de recours.

Les enjeux agricoles en travers du chemin

Un prob­lème de san­té humaine, mais aus­si de san­té vétéri­naire. L’usage des antibi­o­tiques dans les éle­vages est ain­si un des moteurs du développe­ment des résis­tances aux antimi­cro­bi­ens. Très con­trôlés dans les éle­vages européens, ils restent généreuse­ment admin­istrés aux bétails dans d’autres régions. Aux États-Unis, cette pra­tique reste autorisée, lim­itée depuis 2017 aux antibi­o­tiques qui ne sont pas impor­tants pour la san­té humaine. Mais ces derniers restent appro­priés pour le soin et restent même l’essentiel de la phar­ma­copée vétérinaire. 

Des solutions difficiles à faire émerger

Selon l’OMS, 50 nou­veaux antibi­o­tiques sont en cours de développe­ment. 32 ciblent des pathogènes con­sid­érés comme pri­or­i­taires pour la san­té humaine, mais l’autorité médi­cale transna­tionale leur recon­naît un béné­fice lim­ité com­paré aux molécules exis­tantes. Seule­ment 2 d’entre eux agis­sent sur les bac­téries à Gram négatif mul­ti­ré­sis­tantes, des souch­es dont les con­séquences san­i­taires grossis­sent très rapidement.

La plu­part de ces can­di­dats médica­ments sont encore en phase pré­coce d’évaluation et 252 agents antibi­o­tiques ciblant les pathogènes pri­or­i­taires sont en phase pré­clin­ique. La petite part de ces molécules qui s’avérera sûre et effi­cace en san­té humaine ne sera pas disponible avant une décennie.

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