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Mais où sont donc les imprimantes 3D ?

Des imprimantes 3D dans les blocs opératoires

Annalisa Plaitano, médiatrice scientifique
Le 31 mars 2021 |
3 min. de lecture
Bernardo Innocenti
Bernardo Innocenti
professeur en biomécanique à l’École polytechnique de Bruxelles et à l’Université Libre de Bruxelles
En bref
  • La chirurgie est l’un des secteurs pionniers de l’impression 3D, mais de plus en plus de spécialités médicales investissent cette technologie (comme la cardiologie, l’urologie ou la neurochirurgie).
  • La personnalisation permise par cette technologie est un atout capital pour les chirurgiens.
  • Cela leur permet non seulement de produire des prothèses sur mesure pour les patients, mais également d’imprimer des prototypes tridimensionnels des parties endommagées pour les visualiser avant l’opération.
  • L’impression 3D reste cependant en compétition avec les méthodes traditionnelles de production et de suivi post-opératoire, qui restent parfois moins coûteuses et tout aussi efficaces.

Depuis quelques années, l’impression 3D est dev­enue une tech­nolo­gie impor­tante pour la médecine, notam­ment dans des domaines comme celui des pro­thès­es et des implants den­taires ou osseux, mais égale­ment pour la sub­sti­tu­tion de mem­bres amputés ou la recon­struc­tion de la peau des per­son­nes vic­times de brûlures. 

Plus récem­ment, bien d’autres dis­ci­plines médi­cales, comme les secteurs car­dio-vas­cu­laire, urologique et neu­rochirur­gi­cal, ont aus­si com­mencé à s’intéresser à la fab­ri­ca­tion addi­tive. Alors que les recherch­es en bio-impres­sion d’organes et tis­sus cherchent des pistes pour pal­li­er le manque de don­neurs d’organes, le secteur phar­ma­ceu­tique s’en empare égale­ment pour con­cevoir des médica­ments aux formes et aux pro­priétés particulières.

L’impression per­son­nal­isée de dis­posi­tifs médicaux

Le grand atout de l’impression 3D est sa capac­ité de per­son­nal­i­sa­tion : les implants den­taires, les pro­thès­es de hanch­es, côtes, ster­num, genoux, mais aus­si les appareils audi­tifs ou les semelles orthopédiques, devi­en­nent ain­si des objets uniques, spé­ci­fiques à chaque patient.

L’ingénieur Bernar­do Inno­cen­ti, pro­fesseur en bio­mé­canique à l’École poly­tech­nique de l’Université Libre de Brux­elles et prési­dent de la société belge CAOS (Com­put­er Assist­ed Orthopaedic Surgery) tra­vaille en col­lab­o­ra­tion avec les chirurgiens orthopédiques, et en par­ti­c­uli­er avec les spé­cial­istes de la chirurgie du genou. 

Il explique que l’u­til­i­sa­tion de la fab­ri­ca­tion addi­tive en chirurgie est un tra­vail inter­dis­ci­plinaire, néces­si­tant un dia­logue con­tinu entre chirurgiens, chercheurs et ingénieurs. L’in­ter­ac­tion entre ces fig­ures pro­fes­sion­nelles est selon lui la clé du suc­cès d’un pro­duit bio­médi­cal et de la guéri­son du patient après une opéra­tion. « L’impression 3D ne sert pas seule­ment à la fab­ri­ca­tion des implants à installer, mais donne surtout au chirurgien le max­i­mum d’informations pos­si­bles con­cer­nant l’or­gane sur lequel il faut inter­venir, avant même l’opération » précise-t-il. 

Cœur d’un patient imprimé en 3D ©Bernar­do Innocenti

Pré­par­er les opérations 

En effet, en phase préopéra­toire, l’impression d’une réplique tridi­men­sion­nelle de la par­tie con­cernée peut aider à col­lecter des don­nées cap­i­tales, par­fois impos­si­bles à obtenir sans cette tech­nolo­gie. Le chirurgien peut ain­si tenir dans sa main l’os ou l’articulation, en se ren­dant pré­cisé­ment compte de la forme, de l’encombrement, des car­ac­téris­tiques tac­tiles, de l’é­ten­due du dommage. 

« Aujourd’hui, en util­isant dif­férentes couleurs et matéri­aux d’impression, nous pou­vons vrai­ment simuler l’os et définir les zones de haute ou basse den­sité osseuse, pour décider où pos­er les vis et les plaques » s’en­t­hou­si­asme Bernar­do Innocenti. 

L’impression 3D per­met non seule­ment de con­cevoir des pro­thès­es sur mesure, mais égale­ment de fab­ri­quer des instru­ments chirur­gi­caux per­son­nal­isés, pour garan­tir une inser­tion sur mesure pour chaque patient, ten­ant compte de la posi­tion de ses mus­cles et ses ten­dons. Des guides chirur­gi­caux, par exem­ple, aident le chirurgien à définir les lignes de coupe et les points de trépanation. 

En phase post-opératoire

La fab­ri­ca­tion addi­tive pour­rait égale­ment être utile en phase post-opéra­toire, pour sur­veiller la crois­sance de l’os et l’in­té­gra­tion prothèse/os, mais il existe pour l’instant des méth­odes moins coû­teuses et très efficaces. 

Bernar­do Inno­cen­ti tient à soulign­er que l’utilisation de la fab­ri­ca­tion addi­tive en chirurgie présente d’énormes avan­tages si toutes les étapes sont exé­cutées avec une extrême pré­ci­sion, mais égale­ment si l’on dis­pose des moyens et surtout du temps néces­saire. En effet, l’interaction médecin/ingénieur, la con­cep­tion, la mod­éli­sa­tion imposent des délais sup­plé­men­taires, alors que les durées de fab­ri­ca­tion et d’installation en phase opéra­toire sont com­pa­ra­bles aux autres techniques. 

« Si l’impression 3D en chirurgie met­tra quelques années à se démoc­ra­tis­er et à être accep­tée par les prati­ciens, nous voyons d’ores et déjà une impor­tante dif­fu­sion dans l’enseignement », assure Bernar­do Inno­cen­ti.  « Dans le cas des patholo­gies rares, l’impression 3D pour­ra même aider à la con­sti­tu­tion d’une base de don­nées pour la for­ma­tion des jeunes chirurgiens ».Récem­ment, il a même com­mencé à tra­vailler dans le champ de la car­di­olo­gie, un autre secteur où l’utilisation de la fab­ri­ca­tion addi­tive est en crois­sance. Comme dans le cas du secteur orthopédique, l’in­térêt ne réside pas seule­ment dans la fab­ri­ca­tion de pro­thès­es (valves et stents) mais aus­si dans le degré de pré­ci­sion qu’elle per­met en phase opéra­toire. « Plus qu’améliorer les instru­ments et les médica­ments, la fab­ri­ca­tion addi­tive améliore la thérapie dans sa glob­al­ité », con­clut Bernar­do Innocenti.

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